Avant 1914
Loin des frontières terrestres, peu industrialisé, le Maine-et-Loire n’a rien pour attirer les étrangers avant 1914. Mais cet isolement peut être un atout aux yeux des autorités pour y installer des réfugiés politiques, Polonais, Italiens, Espagnols, dont quelques un vont faire souche.
Le Maine-et-Loire, comme tout l’Ouest, reçoit peu d’étrangers jusqu’à la guerre de 1914 (à la différence de l’Est et du Midi) [1]. Il est loin des frontières terrestres, relativement peu industrialisé, et son agriculture n’emploie que de la main d’œuvre familiale.
Nombre d’étrangers en | 1851 | 1876 | 1906 | 1911 |
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Maine-et-Loire | 432 | 744 | 872 | 1097 |
Dont à Angers | 156 | |||
Dont à Saumur | 63 | |||
Dont à Cholet | 17 | 33 | 28 | |
Première nationalité présente, en % | non établi | Allemands : 22% | Anglais : 20% | Anglais : 18% |
source : Statistique générale de la France
Entre 1901 et 1911, les effectifs des Anglais, des Allemands, des Belges et des Suisses varient peu, et l’on note la progression des Espagnols, des Italiens et des Grecs.
Pour 1906 et 1911, on dispose aussi des effectifs de Français naturalisés, respectivement 385 et 508 personnes.
Les étrangers installés en Maine-et-Loire sont des artisans, des commerçants, des techniciens de l’industrie, des religieuses. On trouve alors deux tiers d’hommes, un tiers de femmes. On trouve cependant trace, en 1913 et 1914, d’une immigration de main d’œuvre peu qualifiée, probablement organisée par des intermédiaires. En novembre 1913, la Commission des Ardoisières fait venir des ouvriers italiens pour briser une grève des ardoisiers. Informés de la situation, les Italiens refusent de travailler et repartent [2]. En août 1914, les mines d’or de Saint-Pierre-Montlimart sont mises en chômage : on apprend à cette occasion qu’y travaillaient, des Marocains, des Italiens (environ 80), des Grecs (environ 30) [3].
L’exemple de Cholet a été étudié soigneusement :
LES REFUGIES POLITIQUES
La situation du Maine-et-Loire loin des frontières lui vaut d’être désigné comme point d’accueil de réfugiés politiques pris en charge par les autorités quand ils n’ont pas de ressources propres. Trait commun à ces réfugiés, ils quittent plus ou moins rapidement leur région d’asile, pour retourner dans leur pays. Cependant certains s’installent et font souche.
Les premiers à arriver sont les Polonais. La Pologne est depuis la fin du XVIIIe siècle (jusqu’en 1918) démembrée en trois tronçons annexés par la Russie, la Prusse, l’Autriche : à plusieurs reprises, les Polonais se soulèvent ; réprimés et vaincus, ils se réfugient en France. Ces arrivées en Maine-et-Loire se situent en 1833. En 1834, il y a 132 réfugiés, dont le nombre diminue progressivement (départs, décès). Si le nombre de 132 ne fut jamais dépassé, les nouvelles arrivées maintinrent la colonie polonaise : au total, 300 Polonais passèrent en Anjou. 91 épousèrent des Françaises, et s’installèrent, essentiellement comme commerçants et artisans. Les Polonais bénéficiaient de la sympathie des Angevins : en 1848, seul cas en France, ils purent même voter aux élections.
En 1845, 45 réfugiés politiques italiens venant de Romagne arrivent à Saumur : ils s’étaient soulevés contre le pouvoir temporel du pape. Amnistiés en 1846, ils repartent rapidement, sauf un petit nombre qui va être le noyau d’une colonie italienne dans cette ville, d’une vingtaine de personnes, artisans et commerçants ; l’un d’entre eux, Angelo Bolognesi, devient conseiller municipal.
Cette présence des Italiens à Saumur a été étudiée par :
Jérôme Hervé, « Des réfugiés politiques italiens en Maine-et-Loire : accueil et intégration (1845-1900) », Annales de Bretagne et des Pays de l’Ouest [En ligne], 109-4 | 2002, mis en ligne le 20 décembre 2004. URL : http://abpo.revues.org/1512
Jean-Luc Marais
docteur en histoire et maître de conférences honoraire de l’Université d’Angers